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samedi 17 août 2024

Alien : Romulus

 
Titre : Alien : Romulus
Réalisateur : Fede Alvarez
Acteurs : Cailee Spaeny, David Jonsson, Archie Renaux
Date de sortie en France : 14/08/2024
Genre : science-fiction, horreur
 
Synopsis : 
 Alors qu’il entreprend des fouilles dans une station spatiale abandonnée, un groupe de jeunes voyageurs se retrouve confronté à la forme de vie la plus terrifiante de l'univers…
 
Avis : 
La saga Alien fait partie de ces rares séries de films à conserver une aura relativement intacte, malgré des épisodes de plus en plus clivants au fil des années. Très clairement, depuis Aliens, le retour (il y a presque 40 ans...), le moins que l'on puisse dire, c'est que chaque film divise... ou fait quasiment l'unanimité contre lui, comme le dernier en date, Alien : Covenant. Pourtant, malgré ces échecs, malgré les projets avortés, malgré les crossovers médiocres, l'arrivée sur nos écran d'un nouveau film de la saga initiée par Ridley Scott reste un événement, surtout lorsqu'il est mis en scène par l'une des figures montantes du genre : Fede Alvarez, le réalisateur de Don't breathe - la maison des ténèbres et de Evil dead (2013).


Le réalisateur uruguayen va justement se raccrocher aux deux plus grands succès de la série, en situant son histoire entre Alien, le huitième passager et Aliens, le retour. Un choix chronologique qui va également avoir un impact direct sur l'identité de Alien : Romulus, ce dernier étant à bien des égards un "Alien 1.5" : la première partie, où les personnages parcourent une épave abandonnée et découvrent la menace, s'inspire clairement du film de Scott ; la seconde, plus musclée, évoque celui de Cameron. Et si quelques éléments rappellent Alien 3 ou Alien : la résurrection, Alvarez semble vouloir nous montrer qu'il aime et connaît ses classiques, quitte à parfois rester un peu sage. 

Car, même si l'on prend un véritable plaisir à retrouver les couloirs sombres typiques de la saga, si l'on adore replonger dans cette ambiance craspec et violente, si l'on retrouve plus de vagins et de pénis que dans une soirée organisée par DSK, si l'on apprécie de voir les facehuggers et les xénomorphes redevenir des menaces crédibles, si l'on frissonnera même un peu durant la première heure, il faut bien avouer que le film ne réserve que peu de surprises, et le spectateur averti aura systématiquement une longueur d'avance sur les personnages. Cet aspect sera même plus présent encore pour les amateurs de jeux vidéo, certains éléments rappelant Alien : Isolation
 

 Ce n'est certes pas un défaut rédhibitoire, mais Alien : Romulus ne propose finalement que très peu de nouvelles idées et, lorsqu'il le fait, c'est en jouant avec le réalisme (la gravité, par exemple, qui donne de superbes séquences sur lesquelles il ne faudra pas être trop pointilleux). De même, on pourra regretter les innombrables clins d'oeil du film à ses aînés... jusqu'à l'indigestion (certain plans, les répliques cultes des précédents films, le personnage de Rook). 

Renouant avec l'identité des premières heures de la saga, pour le meilleur comme pour l'un peu moins bon, Fede Alvarez nous en offre de façon presque inattendue son épisode le plus réussi depuis 1986. Et je dois bien l'avouer : ça fait bien longtemps que je n'avais pas eu envie de suivre de nouvelles aventures dans cet univers... tant qu'on laisse Ridley Scott loin de tout ça !



lundi 1 janvier 2024

When evil lurks

 

Titre : When Evil lurks 
Réalisateur : Demian Rugna
Acteurs : Ezequiel Rodríguez, Demián Salomón, Silvina Sabater, Luis Ziembrowski, Marcelo Michinaux, Emilio Vodanovich
Date de sortie en France : 
Genre : horreur
 
Synopsis : 
Après avoir découvert un cadavre mutilé près de leur propriété, deux frères apprennent que les événements étranges survenant dans leur village sont causés par un esprit démoniaque qui a élu domicile dans le corps purulent d’un homme. Le mal dont souffre ce dernier ne tarde pas à se répandre comme une épidémie, affectant d’autres habitants de la région. 
 
Avis :
Des éclats de rire insolents, des invitations à forniquer avec votre génitrice, des paroles incompréhensibles, des corps tordus dans tous les sens, du vomi : il ne s'agit pas du dernier clip d'un rappeur français à la mode, mais d'un condensé assez exhaustif de ce que l'on retrouve dans quasiment 100% des films de possession des 50 dernières années. Car s'il est un genre qui peine à se renouveler, plus encore que le slasher, c'est bien le sous-Exorciste, avec ses dizaines de clones infréquentables. En 2023 encore, "L'Exorciste du Vatican" (malgré la performance sympathique de Russell Crowe) ou "L'Exorciste Dévotion" semblaient indiquer qu'il n'y a pas grand chose à espérer du genre. Pourtant, à bien creuser, on peut trouver quelques exceptions : le fascinant "The Witch", l'éreintant "The Strangers" ou l'éprouvant "The Medium", par exemple. Et en 2023, c'est d'Argentine que viennent les ténèbres, avec When Evil lurks
 
 
Le point de départ est le suivant : deux frères découvrent un homme qu'ils identifient immédiatement comme possédé. L'idée est assez simple, mais présente immédiatement une certaine originalité puisque les personnages reconnaissent immédiatement la nature de la menace, loin des tergiversations accompagnant généralement la santé des possédés dans la plupart des films du genre. Néanmoins, ils ignorent comment affronter cette menace, malgré quelques réflexes immédiats, d'autant que les autorités font la sourde oreille. En quelques minutes, Demian Rugna nous présente, avec une redoutable efficacité, quelques règles particulières relatives à cette possession (ne pas toucher le possédé, ne pas utiliser d'arme à feu, ne pas utiliser de lumière électrique...) ainsi que les traits principaux de ses personnages, aux caractères bien trempés. Tellement bien trempés qu'ils vont malencontreusement participer à la propagation du Mal. 

Car ici, le Mal engendre littéralement le Mal, et le fait de ne pas respecter les règles entraîne des conséquences tragiques : il est fort probable que vous y réfléchirez à deux fois après avoir vu le film avant de violer le conseil de vous éloigner des animaux. Malheureusement, Pedro, Jaime et Ruiz sont des hommes sanguins, une faille que va aisément utiliser le Démon en utilisant leur colère, leur tristesse, leur peur et leur bêtise pour se développer. Si le concept est classique dans le genre, il est ici brillamment exploité, en confrontant en permanence les personnages à leurs failles, à leurs espoirs, à leurs histoires. Pedro, par exemple, le personnage principal, est obsédé par la sécurité de ses fils, dont l'un est autiste, qu'il ne peut plus voir depuis son divorce. Jusqu'au bout, ces éléments influeront sur ces décisions, en faisant un personnage imparfait et nuancé, ce que j'ai tout particulièrement apprécié. 
 
 
C'est d'ailleurs l'une des principales qualités de When Evil lurks : sa radicalité. Loin d'un cinéma consensuel et trop propre que l'on voit trop souvent, il n'hésite pas à frapper là où ça fait mal, à explorer des thématiques sombres, renforçant parfaitement le sentiment de malaise qu'il fait naître chez le spectateur. Le Mal peut frapper fort, à n'importe quel moment (une bonne partie du film se déroule d'ailleurs de jour), et semble simplement omniprésent. On appréciera d'ailleurs la qualité des maquillages, notamment chez Uriel, possédé complètement déformé par ce qui le ronge, et semblant transpirer le pus et le Diable par tous les orifices.

When Evil lurks est ainsi la pépite que l'on osait plus attendre sur une thématique trop souvent synonyme de navets. En nous offrant un regard neuf sur le sujet de la possession, et en allant jusqu'au bout de ses idées (la façon de détourner certains éléments sacrés est brillante), Demian Rugna nous livre un film très réussi, qui se hisse sans problème parmi les meilleurs films d'horreur de ces dernières années. Espérons qu'après sa tournée des festivals, le film (actuellement disponible sur la plate-forme Shudder) parvienne à se faire une place sur nos écrans de cinéma ! 



lundi 31 octobre 2022

Smile

 

Titre : Smile
Réalisateur : Parker Finn
Acteurs : Sosie Bacon, Jessie T. Usher, Kyle Gallner
Date de sortie en France : 28 septembre 2022
Genre : épouvante, horreur

Synopsis :  
Après avoir été témoin d'un incident traumatisant impliquant l’une de ses patientes, la vie de la psychiatre Rose Cotter tourne au cauchemar. Terrassée par une force mystérieuse, Rose va devoir se confronter à son passé pour tenter de survivre…
 
Avis : 
Vous souvenez-vous de ces vidéos sans intérêt, où l'on devait regarder une vidéo d'une pièce vide ou d'une voiture sur une route de campagne, jusqu'à un bon gros screamer des familles destinés à nous faire sursauter ? Quelque chose me dit que Parker Finn a vu ses vidéos, et s'en est fortement inspiré pour son premier film, Smile. Car, comme trop souvent ces dernières années, on se retrouve ici devant une énième foire aux jump-scares, d'autant plus frustrante que le film aurait sans doute très bien fonctionné sans ces artifices. 
 
 
De manière générale, on aura en fait une grosse impression de maladresse, peut-être parce qu'il s'agit d'un premier long métrage. D'un côté, on a cette idée séduisante de malédiction qui se transmet, à la manière de certains classiques de la J-Horror ou du récent It follows. L'utilisation du sourire comme élément inquiétant n'est certes pas nouvelle (de L'Homme qui rit à Joker en passant par de nombreux tueurs en série du cinéma), mais intrigue et met assez mal à l'aise lors de la première séquence où il apparaît. Malheureusement, on aura le sentiment que cet aspect est sous-exploité, ses trop rares utilisations manquant singulièrement de finesse. J'aurais par exemple aimé que la menace soit plus présente, quitte à ne pas être systématiquement perçue par l'héroïne... un peu comme dans It follows, quelque part. 

Mais cela vient probablement du fait que le réalisateur et scénariste a souhaité jouer sur la psychologie de son personnage principal, nous laissant très longtemps face à deux interprétations possibles : celle de la folie du personnage, ou celle de la menace démoniaque. Dans les deux cas, on n'échappera pas à certains poncifs, comme le trauma d'enfance (on pense cette fois à Simetierre), l'alarme qui se déclenche pour rien ou la disparition du chat, mais on appréciera le fait que les proches de Rose soient franchement perdus face à la situation, rejetant violemment l'explication irrationnelle et tentant de se rassurer derrière des postures toutes faites : "c'est dans ta tête, Rose", "tu devrais voir un psy, Rose", "c'est à cause de ton enfance, Rose", etc. Dans un genre où les personnages ont souvent les réactions les plus connes possibles, voir l'héroïne (interprétée par une étonnante Sosie Bacon) tenter d'obtenir l'aide de ses proches et la voir s'effriter petit à petit face à son compagnon, à sa famille ou à son supérieur est clairement un bon point pour Smile

Au final, alors que je n'en attendais pas grand chose, Smile m'a laissé un goût étrange, celui d'un film qui aurait pu être bien meilleur s'il s'était contenté de développer simplement son histoire, de jouer sur son ambiance, plutôt que de céder aux sirènes du film d'épouvante 2020s, avec ses jump-scares téléphonés, agaçants, et parfois sans aucun sens.
 
 


samedi 3 septembre 2022

Esther 2 : les origines


 Titre : Esther 2 : les origines (Orphan: first kill)
Réalisateur : William Brent Bell
Acteurs : Isabelle Fuhrman, Julia Stiles, Rossif Sutherland
Date de sortie en France : 17 août 2022
Genre : épouvante, horreur, thriller

Synopsis : 
Esther revient ! La saga terrifiante se poursuit dans cette préquelle palpitante. Après avoir orchestré une brillante évasion d'un établissement psychiatrique, Esther se rend en Amérique en se faisant passer pour la fille disparue d'une famille aisée. Mais, face à une mère prête à tout pour protéger sa famille, son plan va prendre une tournure inattendue. Il vous reste beaucoup de choses à découvrir sur Esther… 
 
Avis : 
Il faut bien avouer qu'on ne l'attendait pas : une préquelle, 13 ans plus tard, avec la même actrice dans le rôle titre, d'un film mettant en scène une gamine tueuse ? Et pourtant, magie du cinéma, le très sympathique Esther voit donc débarquer en 2022 un second volet censé raconter "les origines" du personnage, avec une actrice qui a désormais 25 ans dans le rôle de la (fausse) gamine psychopathe. 
 
 
Evidemment, cet étrange choix sera le principal défaut du film. Le problème, quand on tente de grimer une actrice de 25 ans en gamine de 9 ans... c'est que ça la vieillit, et donne l'impression qu'Isabelle Fuhrman a 40 ans. Pire encore, ça donne surtout l'impression d'un cosplay raté, où d'une personne âgée en pleine régression mentale. C'est simple, à aucun moment on n'a l'impression d'avoir une gamine à l'écran, ni d'être devant une histoire se déroulant avant les événements du premier Esther. On finit même par plutôt y voir une suite, se déroulant des années plus tard avec une adolescente psychopathe. 

Et c'est bien dommage, car cet élément parasite tout le film, alors que celui-ci n'est pas la catastrophe à laquelle tous ces choix étranges semblaient le destiner. Au contraire même, si l'on pense d'abord être devant être un copié-collé du premier volet, le scénario a l'excellente idée de bifurquer à mi-chemin pour offrir quelque chose. On regrettera simplement qu'il ne sache pas vraiment quoi faire de cette idée, notamment par rapport au personnage du père ou par rapport à la véritable Esther, dont la psychopathe prend la place. 

Bref, pas une catastrophe, mais loin d'être aussi réussi ou étonnant que son aîné, Esther 2 arrive sans doute bien trop tard et aligne maladresse sur maladresse. Apparemment, en cas de succès, un troisième volet pourrait voir le jour : espérons qu'il s'agisse cette fois d'une suite, et qu'on ne fasse pas du personnage un énième slasher sans intérêt...





dimanche 7 août 2022

Incantation

 

Titre : Incantation (Zhou)
Réalisateur : Kevin Ko
Acteurs : Hsuan-yen Tsai, Ying-Hsuan Kao, Sean Lin
Date de sortie en France : 8 juillet 2022 (Netflix)
Genre : fantastique, épouvante
 
Synopsis : 
Il y a six ans, Lee Jo-nan était frappée d'une malédiction après avoir brisé un tabou religieux. Aujourd'hui, elle doit protéger sa fille des répercussions de ses actes. 
 
Avis : 
Je ne sais pas si c'est pareil pour vous, mais en tant qu'amateur de cinéma d'horreur et d'épouvante, certains qualificatifs allument immédiatement des alarmes dans mon esprit. Les expressions "le film le plus terrifiant" ou "inspiré d'une histoire vraie", les articles sur des sites de mode ou de jeux vidéo sur les spectateurs apparemment traumatisés par un film, les vagues de tweets à la syntaxe acrobatique indiquant que "se filme ma fé fair dé cochemarres lol ptdr", tout ceci me donne envie de fuir. Tout comme la mention "found footage", devenue depuis longtemps synonyme presque systématique de "bonne grosse daube fauchée sans imagination". Et j'avoue me méfier des films estampillés Netflix, Amazon Prime, Disney+... Alors forcément, quand un found-footage arrive de Taïwan, avec l'étiquette Netflix, auréolé du titre de "plus gros succès horrifique du pays" et qu'il a provoqué plus de terreur chez les adolescents que l'ouverture d'un Bescherelle, tous les voyants sont au rouge ! Mais quand même, là-bas, au fond, quelques petits signes m'ont incité à donner une chance à Incantation : les avis plutôt positifs de quelques connaissances, et les avis les plus négatifs sur Allociné. Merci à vous, car contre toute attente, j'ai plutôt aimé le film de Kevin Ko, malgré quelques gros défauts. 
 

 

La première chose qui frappe devant Incantation, c'est sa volonté d'impliquer le spectateur. A ce titre, on peut presque se réjouir de découvrir le film sur Netflix, et de pouvoir le regarder seul, dans le noir, plutôt que dans une salle bondée. Dès les premières minutes, le personnage principal nous interpelle directement, brisant le sacrosaint quatrième mur, nous fait participer à quelques illusions d'optique, et nous invite à mémoriser une image et à retenir et réciter une incantation afin de protéger sa fille, manifestement victime d'une malédiction ou d'une possession, si l'on en croit les images que nous avons vues un peu plus tôt. Et, régulièrement, on viendra nous rappeler cette fameuse incantation (Hou-ho-xiu-yi, Si-sei-wu-ma), nous plongeant entièrement dans le récit. Et si le procédé semble d'abord un peu gratuit, un peu facile, le final nous montrera au contraire que cette façon d'impliquer le spectateur était une vraie bonne idée.

Passées ces instructions, nous nous retrouvons d'abord devant un found-footage assez classique, lorgnant clairement vers Paranormal Activity par exemple (le son qui accompagne les manifestations étranges, l'ombre qui semble s'intéresser à la gamine), en plus agressif. Nous n'en sommes encore qu'aux premières minutes que l'esprit, le fantôme ou le démon qui tourne autour de Ronan et de Dodo s'en est déjà donné à coeur joie pour effrayer le spectateur et, même si l'on connaît parfaitement ces ficelles, cette agressivité est assez efficace. 
 

 
Le rythme retombe ensuite légèrement, tandis qu'Incantation nous aiguille sur sa principale thématique, celle de la malédiction autour de Dodo. C'est sans doute là que se trouve le principal défaut du film... mais aussi l'une de ses principales qualités : l'enquête est assez passionnante, d'autant que l'on découvre totalement le culte lié à Mère Bouddha, entre incantations, sacrifices, et offrandes. Des rituels obscurs, souvent associés au body horror (trypophobes s'abstenir), dont on va, comme les personnages, tenter de recoller les morceaux, comme pour un puzzle macabre. Un puzzle d'autant plus compliqué à appréhender que la narration du film est très éclatée, jonglant sans prévenir entre les époques, nous laissant parfois un peu confus. 

Difficile de vraiment savoir si ce procédé handicape réellement le film : d'un côté, il renforce clairement le sentiment d'inconfort du spectateur qui, déjà baladé par les mouvements des caméras portées par les protagonistes, ne peut même pas réfléchir tranquillement aux éléments qu'il a face à lui. De l'autre, il est parfois vraiment frustrant, et peut clairement faire décrocher les moins attentifs, d'autant que le film est assez long et parfois assez bavard. Il faudrait presque le regarder une seconde fois assez rapidement pour mieux appréhender l'ensemble des subtilités... mais qui en aura vraiment envie ?
 

 
L'éclatement de la narration permet également de détourner un peu l'attention des thématiques souvent classiques, et que l'on connaît déjà via les représentants les plus connus de la J-Horror. L'idée d'une malédiction se transmettant rappelle ainsi Ring ou Kaïro, les allers-retours temporels évoquent la saga Ju-On, et la détérioration de l'état mental de la mère, ainsi que ses conséquences sur la santé de sa fille, font quant à eux écho à Dark water. On retrouve également quelques séquences assez classiques, mais souvent efficaces, de l'apparition furtive d'une ombre à cette route qui se répète, encore et encore, en passant par des objets qui bougent seuls : sans cette malédiction que l'on découvre petit à petit, nous serions sans doute en terrain (très) connu, ce qui ne retire rien à la force de certains passages, comme la visite de la grotte, au centre du mystère. On sera même surpris par le faible nombre de jump-scares, ce qui est forcément une qualité pour un film tentant surtout d'installer une ambiance. 

En dehors d'une narration parfois agaçante, cet Incantation a donc été pour moi une très bonne surprise. Si l'on n'est certes pas sur le film le plus terrifiant de tous les temps. J'ai vraiment adoré découvrir les éléments de cet étrange culte et cette malédiction, j'ai parfois frissonné, et j'ai adoré la façon qu'a le film d'impliquer le spectateur, jusque dans un final vraiment étonnant. Allez, tous avec moi : Hou-ho-xiu-yi, Si-sei-wu-ma, Hou-ho-xiu-yi, Si-sei-wu-ma... Tout va bien se passer.
 

 

jeudi 26 mai 2022

Dark Water


Titre : Dark Water (Honogurai mizu no soko kara)
Réalisateur : Hideo Nakata
Acteurs : Hitomi Kuroki, Rio Kanno, Mirei Oguchi
Date de sortie en France : 26 février 2003
Genre : épouvante, drame 
 
Synopsis : 
En instance de divorce, Yoshimi et sa fille de six ans Ikuko emménagent dans un immeuble vétuste de la banlieue de Tokyo. Alors qu’elles tentent de s’acclimater à leur nouvelle vie des phénomènes mystérieux se produisent. Qui est cette fillette en ciré jaune qui se promène dans les couloirs ? Pourquoi un petit sac pour enfant rouge ne cesse d’apparaître entre les mains d’Ikuko ? Quelle est l’origine de ces ruissellements qui s’étendent sur les murs et le plafond de leur appartement ? Une menace venue de l’au-delà va tenter de séparer la mère de sa fille. 
 
Avis : 
Après le succès de Ring, Hideo Nakata s'est rapidement retrouvé, un peu malgré lui, catalogué comme maître de l'épouvante. Pourtant, lui-même confesse volontiers n'avoir que peu d'intérêt pour le cinéma d'horreur, lui préférant plutôt le drame. Un goût que l'on retrouvait largement dans Ring et Ring 2, Sadako étant principalement décrite comme une victime, et qui va largement imprégner son chef d'oeuvre : le superbe Dark Water
 
 
Car avant d'être un redoutable film d'épouvante, Dark Water est avant tout un drame : celui d'une mère qui tente d'élever seule sa fille suite à son divorce. Yoshimi doit retrouver un logement convenable, chercher un travail, et rendre compte régulièrement de sa capacité à s'occuper correctement de sa fille. En somme, une situation particulièrement stressante pour une mère, que l'on renvoie sans cesse à son statut de faible femme : on n'hésite pas à lui cacher les vices de son nouvel appartement, à l'ignorer ostensiblement lorsqu'elle signale un problème, à lui mettre une formidable pression au moindre aléa. La réalisation de Nakata renforce d'ailleurs superbement ce sentiment d'infériorité imposé à Yoshimi en mettant systématiquement en avant les figures masculines qui sont en contact avec elle. 

L'épouvante va ainsi venir épouser les contours d'une peur bien plus terre à terre : celle de perdre la garde de son enfant, d'être totalement dépassée dans un environnement inconnu et hostile. Si l'eau est évidemment l'élément catalyseur des apparitions du spectre auquel est confronté la mère divorcée, elle vient en premier lieu renforcer le sentiment de solitude et d'égarement du personnage : son nouvel immeuble semble constamment arrosé par une pluie intense, et son propre appartement est envahi par un élément étranger, l'eau s'infiltrant du logement du dessus. 
 
 
C'est sans doute pour cela que Dark Water, s'il n'use pourtant pas de grands artifices pour effrayer le spectateur, est aussi efficace. Il part d'éléments tangibles, que chacun redoute, pour faire naître le fantastique, faisant également naître le doute sur l'état mental de Yoshimi : finalement, l'appartement inondé du dessus, qu'elle visite le temps d'une séquence impressionnante, n'est pas aussi dégradé lorsqu'elle y revient... avec des hommes. Et ce cartable rouge, qui la met dans tous ses états lorsqu'elle le voit, ce n'est qu'un banal cartable de jeune écolière, non ?

A l'image de l'eau qui s'infiltre, d'abord lentement, puis de plus en plus intensément, dans l'appartement de Yoshiki, l'angoisse progresse peu à peu chez le spectateur, à mesure que l'on découvre la nature de la menace... et du drame qui s'est joué dans cet immeuble. Et, si comme je le disais quelques lignes plus haut, Nakata n'use pas d'artifices démesurés, il nous offre quelques séquences mémorables et tétanisantes, comme ces passages dans l'ascenseur ou les visites à l'étage supérieur ou sur le toit. Et si le film fait peur, il va également réussir à nous tirer quelques larmes en fin de film. 

Ring était un classique immédiat. Dark Water est tout simplement le chef d'oeuvre de son réalisateur. Un drame horrifique prenant, intelligent, terrifiant et émouvant. Tout ce que ne sera pas son triste remake, à peine trois ans plus tard, réalisé par Walter Salles et avec Jennifer Connelly. 



 

mardi 3 mai 2022

Ring

 
Titre : Ring (Ringu)
Réalisateur : Hideo Nakata
Acteurs : Nanako Matsushima, Miki Nakatani, Hiroyuki Sanada
Date de sortie en France : 11 avril 2001
Genre : épouvante
 
Synopsis : 
Tokyo, fin des années 2000, une ru­meur se répand parmi les adoles­cents : visionner une mystérieuse cassette vidéo provoquerait une mort cer­taine au bout d’une semaine. Après le dé­cès inexplicable de sa nièce, la journaliste Reiko Asakawa décide de mener l’enquête mais se retrouve elle-même sous le coup de la malédiction. Pendant les sept jours qui lui restent à vivre, elle devra remonter à l’origine de la vidéo fatale et affronter le spectre qui hante les télévisions : Sadako. 
 
Avis : 
Japon, 1998 : une date pour le cinéma d'épouvante mondial. En adaptant le roman Ring de Koji Suzuki, Hideo Nakata a créé, il y a presque 25 ans, une des figures les plus mythiques du cinéma nippon, et entraîné un élan d'intérêt pour le cinéma d'épouvante asiatique, et plus particulièrement la "J-Horror". Dark Water, du même Hideo Nakata, Kaïro, de Kiyoshi Kurosawa, La Mort en ligne de Takashi Miike, la saga Ju-On de Takashi Shimizu, mais aussi les thaïlandais The Eye des frères Pang ou Shutter de Banjong Pisanthanakun et Parkpoom Wongpoom, jusqu'à la vague de remakes américains par Gore Verbinski (Le Cercle - The Ring), Walter Salles (Dark Water) ou Shimizu lui-même (The Grudge) : tous sont les enfants de Ring
 
 
On retrouve ainsi dans le film de Nakata l'ensemble des ingrédients qui définiront le genre. Si le spectre d'une jeune femme aux cheveux longs était relativement inconnu en Occident, il constitue une figure assez classique du folklore japonais : on pense ainsi fortement à Oiwa, l'esprit vengeur au visage difforme, que Ring semble directement évoquer, ou Kuchisake-onna, la femme à la bouche fendue, directement citée au début du film. Des esprits vengeurs donc, pour une malédiction qui restera souvent attachée à un objet : la cassette vidéo ici, la maison de Ju-On, le téléphone de La Mort en ligne... Une malédiction qui donnera au spectre un aspect dramatique, l'esprit revenant se venger d'une mort souvent brutale. L'épouvante et le drame sont ainsi intimement liés dans ces oeuvres, donnant à ces fantômes une aura toute particulière. 

Cette spécificité explique sans doute le rythme si particulier du film : principalement dédié à l'enquête, il distille ses frissons à petites doses, préférant installer après la diffusion de la vidéo maudite une ambiance qui devient peu à peu pesante. On est loin de la foire aux jump-scares que l'on retrouve dans le cinéma épouvante actuel, ce qui pourra sans doute faire fuir les spectateurs confondant "sursauter" et "avoir peur". En revanche, le procédé est redoutablement efficace pour ceux qui aiment sentir s'installer une tension sournoise, pour n'en être libéré qu'avec la célèbre scène où Sadako apparaît enfin pour exercer sa vengeance.  
 

 
Si Ring fait peur, c'est aussi parce que son histoire est passionnante. Loin d'être un simple prétexte, l'enquête menée par Reiko et Ryuji (interprété par Hiroyuki Sanada, que l'on connaît surtout en France pour San Ku Kai, et qui est depuis devenu un visage récurrent à Hollywood, apparaissant dans des films tels que Sunshine, Army of the dead, Avengers : endgame ou encore Mortal Kombat (2021)) nous plonge dans les superstitions et légendes des îles japonaises. On embarque ainsi vers Izu Ô-shima, dont le volcan accueillerait selon les mythes les suicides des amoureux déçus. Dialecte local, coutumes, importance de la mer, fréquence des typhons : c'est dans ce décor particulier qu'ils découvrent l'histoire de la médium Shizuko Yamamura et de sa fille Sadako. Par le biais de flashbacks, on comprend comment le destin de la mère et de sa fille ont basculé, et comment la malédiction va naître. 

Avec cette légende urbaine qui prend vie devant nos yeux, Hideo Nakata met donc les nerfs du spectateur à rude épreuve, et fait naître un pan tout entier du cinéma d'épouvante. On n'oubliera pas de sitôt l'apparition de Sadako, ni la terrible scène du puits ou même la vidéo maudite, des séquences fortes ponctuant un film à l'ambiance pesante. Un must, qui sera suivi d'une suite (Ring 2), d'une préquelle (Ring 0), d'un remake américain (le pas mauvais du tout Le Cercle) et de ses suites et reboots (Le Cercle 2, Le Cercle : Rings), puis de nouveaux épisodes au Japon (Sadako 3D et sa suite), d'un cross-over avec Ju-On (Sadako vs Kayako) avant un ultime (pour le moment ?) volet conçu comme une suite directe à Ring 2, sobrement intitulé Sadako (mais pas 3D, cette fois). Quelque chose me dit que la jeune fille aux longs cheveux noirs n'a pas fini de nous hanter malgré la mort de la VHS... mais qu'elle n'aura plus jamais la puissance de ses débuts.



samedi 15 janvier 2022

Scream (2022)

 

Titre : Scream
Réalisateur : Matt Bettinelli-Olpin, Tyler Gillett
Acteurs : Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette
Date de sortie en France : 12 janvier 2022
Genre : horreur, slasher
 
Synopsis : 
Vingt-cinq ans après que la paisible ville de Woodsboro a été frappée par une série de meurtres violents, un nouveau tueur revêt le masque de Ghostface et prend pour cible un groupe d'adolescents. Il est déterminé à faire ressurgir les sombres secrets du passé. 
 
Avis : 
Ce n'est ni un remake, ni une séquelle, ni un reboot : c'est un "requel". Un film qui s'inscrit dans la continuité du film original, qui en reprend largement les ingrédients, en apporte de nouveaux. Comme un nouveau départ, mais d'une ligne différente. On pourra par exemple citer Jurassic World ou Mad Max : fury road. Un concept un peu bâtard, qui s'inscrit sans doute parfaitement dans le cadre "méta" (un autre concept à la mode en ce moment) lié à la saga Scream depuis le premier volet. 
 
 
Hélas, le film va totalement se noyer dans sa dimension méta. Là où Scream installait une espèce de connivence avec le spectateur, avec des clins d'oeil pas forcément très subtils mais bien placés et qui n'empiétaient pas sur le suspense, ce "requel" a la finesse du pote bourré qui fait une blague bien grasse et qui vérifie à coups de coudes dans les côtes si vous avez bien pigé. Cela donne un truc très cynique, une merde consciente d'être une merde et qui en fait son argument principal. Un Sharknado avec un masque de Ghostface, en quelque sorte. 
 
Résultat, pas de suspense, puisque les réponses sont données dès le début (surtout si on connaît la saga), peu d'intérêt, des personnages qui font regretter ceux de Scream 4, en dehors de la jeune soeur de la nouvelle héroïne et d'une Neve Campbell toujours aussi superbe, quelques passages ridicules (le meurtre de l'hôpital, certaines révélations grotesques, les visions) et un final interminable. Seules quelques séquences, dont l'introduction, se montreront vraiment réussies, dans un film qui tente vainement de donner le change en mettant le curseur "brutalité" un peu plus haut. Un cache-misère. 

Sans doute ne suis-je pas assez friand de cette mode "méta", qui semble trop souvent n'être qu'une excuse destinée à s'excuser de faire moins bien que le modèle (voir le récent Matrix Resurrection). Mais quand même, là où le procédé était utilisé judicieusement par Wes Craven, Scream 5 n'apporte rien, ni à la saga, ni au spectateur. Un film métastrophique...



 
 
 

samedi 11 décembre 2021

Last night in Soho

 
 
Titre : Last night in Soho
Réalisateur : Edgar Wright
Acteurs : Anya Taylor-Joy, Thomasin McKenzie, Matt Smith
Date de sortie en France : 27 octobre 2021
Genre : thriller, épouvante

Synopsis : 
Passionnée de mode, Eloise n'hésite pas un instant quand elle doit elle aussi quitter la campagne anglaise pour rejoindre la capitale, là où sa propre mère mit fin à ses jours des années plus tôt. Sur place, la jeune femme est victime d'un phénomène inexplicable, et elle se retrouve soudainement propulsée dans le Londres des années 60. Prise entre rêve et réalité, elle s'adapte vite à ce cadre si glamour et agréable. Sa rencontre avec une étoile montante de la chanson va transformer ses espoirs et cette illusion en véritable cauchemar. Elle se retrouve désormais en face de tous les fantômes de ce passé qui l'a toujours hantée... 
 
Avis : 
 Les Beatles, les Who, les Rolling Stones, Pink Floyd... Mary Quant et la minijupe... les mannequins Twiggy et Jean Shrimpton... Les Swinging Sixties britanniques représentent une décennie de révolution culturelle, d’explosion artistique, une période de liberté et d’insouciance. Une décennie qu’admire Eloise, jeune étudiante en mode qui débarque à Londres avec ses musiques des années 60 dans la valise. Une décennie qu’elle rejoindra rapidement dans ses rêves, comme pour s’évader d’un monde contemporain où elle ne se reconnaît pas. Pour finalement s’apercevoir que, de l’autre côté du miroir, cette période fantasmée connaît également sa part d’ombre. 
 
 
Après un "Baby Driver" que j’avais trouvé anecdotique, Edgar Wright se frotte cette fois à l’horreur et à l’épouvante psychologique avec cette héroïne fragile, plongée dans un univers inconnu et hostile. Le thème n’est certes pas nouveau, et le personnage interprété par Thomasin McKenzie ("Old") est une petite boule de clichés sur pattes : la fille réservée, mais douée, psychologiquement fragile, qui a perdu sa mère plus jeune, qui débarque de sa campagne avec toute l’innocence que ça implique, qui va être confrontée à la grande ville, à ses excès et à des camarades insupportables. Pourtant, le personnage est attachant, et va nous entraîner sans problème dans son sillage, à la rencontre de Sandie. 
 
Sandie a du culot, Sandie est belle, Sandie a du talent. Et surtout, Sandie a vécu pendant les Swinging Sixties, et rêvait d’être la nouvelle vedette du Café de Paris. Difficile de ne pas tomber instantanément amoureux du personnage interprété par Anya "The Witch" Taylor-Joy (décidément faite pour ce type de rôle), et Eloise va rapidement vouloir la rejoindre tous les soirs... dans ses rêves. Eloise s’inspire de Sandie, se coiffe comme elle, s’habille comme elle, reproduit sa tenue dans son cours dans son cours de mode.Peu à peu, les frontières entre rêve et réalité s’estompent, notamment grâce au jeu permanent d’Edgar Wright sur les lumières et les reflets. 
 
 
Les éléments des rêves surgissent peu à peu dans la réalité, menaçant la santé mentale d’Eloise. Wright prend son temps pour faire basculer son film. Pendant une longue première partie, il nous vend du rêve et de l’espoir, reproduit l’ambiance des 60s avec brio, nous épuisant presque dans l'euphorie d'une danse et d'un rythme intense, n’y intégrant quelques bizarreries qu’avec parcimonie et avec le sens de la référence que le caractérise. Difficile de ne pas penser à Mario Bava ou à Dario Argento sur certains jeux de lumière, ou lorsque Eloise prend le taxi en direction de son école d’arts. Et quand le film embrasse enfin pleinement son côté obscur, c’est après une incroyable reprise de "Downtown" par Anya Taylor-Joy, qui efface définitivement la frontière entre réalité, rêve... et cauchemar. 
 
On ne s’y attend ainsi presque plus lorsque Last night in Soho plonge dans l’épouvante. Pourtant, plus que de la véritable peur, c’est du malaise qu’il fait naître chez le spectateur. Là encore, le thème de la starlette trompée n’est pas neuf, mais la descente aux enfers est terrible, et le faciès si particulier de Matt Smith ("Lost River", le onzième "Doctor Who") renforce encore ce malaise, tout comme ces spectres aux visages flous qui assaillent de plus en plus Eloise. Si la première partie nous étouffait presque par ses lumières, la seconde lui répond parfaitement en nous maintenant en permanence sous pression. Seul petit regret : un final qui s'étire un peu en longueurs, notamment à cause de ficelles scénaristiques trop grosses et d'une tendance à trop expliquer ce que le spectateur avait déjà compris. 

Le dernier Edgar Wright ne ressemble finalement pas vraiment à ses précédentes oeuvres, exception faite de l'importance de la musique dans le film et pour le personnage principal, et de son goût pour les classiques. Le réalisateur britannique signe ici l'un des meilleurs films de l'année, aussi envoutant qu'inquiétant, et peut-être son film le plus abouti. Et n'oubliez pas : Things will be great when you're Downtown, No finer place for sure Downtown... everything's waiting for you... 
 
 

dimanche 31 octobre 2021

The Medium


Titre : The Medium 
Réalisateur : Banjong Pisanthanakun
Acteurs : Narilya Gulmongkolpech, Sawanee Utoomma, Sirani Yankittikan
Date de sortie en France : pfff
Genre : horreur
 
Synopsis : 
Une équipe de film vient tourner un documentaire sur le chamanisme dans un village thaïlandais. Ils s’intéressent tout particulièrement à Nim, une chamane habitée par un esprit qui se transmet de génération en génération dans sa famille. Mais le tournage va prendre une tournure terrifiante…
 
Avis : 
Le cinéma thaïlandais n'est sans doute pas celui que l'on connaît le plus, même pour les amateurs de cinéma asiatique. Une méconnaissance sans doute due à l'exploitation d'un folklore local assez hermétique, avec ses nombreux phi (un terme que l'on pourrait traduire par esprit mais qui est en même temps beaucoup plus riche que ça) et ses légendes locales, comme celle de Nang Nak, exploitée dans de très nombreux films ; mais aussi pour leur goût pour les débordements dérangeants, avec par exemple l'étonnant phi Krasü, créature constituée d'une tête volante d'où pendent ses entrailles, ou l'exploitation horrifique de foetus et de bébés, comme dans The Snow white. Bref, rien de très vendeur pour le grand public occidental, qui ne connaît souvent ce cinéma que par le biais des frères Pang (la saga The Eye, Les Messagers) ou des réalisateurs Parkpoom Wongpoom et Banjong Pisanthanakun (l'excellent Shutter et Alone). Des éléments qui expliquent peut-être pourquoi The Medium ne débarquera sans doute pas sur nos écrans, en dehors de sa projection au Festival du Film Coréen à Paris. Dommage. 
 
                                                          
Pourtant, le film est précédé d'une énorme réputation, née notamment de son exploitation en Corée du Sud : des journalistes qui en pleurent de terreur, des critiques qui en font des cauchemars (ce qui arrivera également à l'un de nos chroniqueurs les plus chevronnés !), des séances où l'on laisse la lumière allumée pour rassurer les spectateurs, d'autres où des bouchons d'oreilles sont distribués... Forcément, même si l'on se méfie toujours de ce genre d'échos (on ne compte plus les films médiocres faisant leur promotion sur les réactions disproportionnées des spectateurs), ça intrigue et donne clairement envie de se faire une idée soi-même. 
 
Une envie d'autant plus grande que le réalisateur n'est autre que Banjong Pisanthanakun (Shutter donc, mais également l'un des plus gros succès de l'histoire du cinéma thaïlandais avec Pee Mak, adaptation... de la légende de Nang Nak), et que le producteur et scénariste est le sud-coréen Na Hong-jin, réalisateur des formidables The Chaser et The Strangers, qui reste l'une des rares expériences cinématographiques de ces dernières années à m'avoir véritablement remué. 
 
 
The Medium se présente comme un reportage suivant le personnage de Nim, une chamane possédée par l'esprit de Ba Yan, et faisant le lien entre la divinité et le village. Dans la famille de Nim, cette tâche se transmet de génération en génération : sa grand mère, puis sa tante ont été possédées par Ba Yan, mais sa soeur Noi a refusé de devenir medium, préférant se tourner vers le Christianisme. Noi vient par ailleurs de perdre son mari, Wiroj, mort d'un cancer, peu après le suicide de leur fils, Mac. Enfin, Nam et Noi ont également un frère aîné, Manit.  

Pisanthanakun prend le temps de nous présenter ces personnages, leurs différents caractères, ce qui les lie et ce qui les sépare, et même certains éléments de leurs passés respectifs, comme le destin du grand-père puis du père de Wiroj. En plus d'apporter une vraie profondeur aux protagonistes (par ailleurs parfaitement interprétés, notamment par Sawanee Utoomma et Narilya Gulmongkolpech), tous ces détails auront leur importance dans l'histoire, renforçant la crédibilité de ce qui leur arrive. Une histoire qui, elle-même, prend le temps de se développer, et réussit même par le biais de ce faux documentaire à donner ou à suggérer au profane les clés nécessaires à la compréhension des événements folkloriques. 
 
 
Et ça fonctionne parfaitement. Comme souvent dans les films traitant de possession, le spectateur attentif pourra repérer les premières manifestations, souvent subtiles, comme un comportement qui change légèrement (un manque d'attention lors de funérailles par exemple) ou un étrange reflet dans une vitre. Les manifestations deviennent ensuite plus classiques, plus évidentes, mais restent terriblement efficaces grâce à un sens aigu de la mise en scène (l'utilisation des caméras portées par l'équipe aura rarement été aussi judicieuse - quitte à parfois sembler artificielle) et du timing. 
 
C'est simple, si le film progresse très lentement durant sa première heure, installant parfaitement ses enjeux et son ambiance, la pression monte ensuite très vite, pour ne plus lâcher le spectateur durant 40 minutes. On bascule alors dans des séquences terrifiantes, où les rares jump-scares viennent simplement nous permettre de souffler quelques secondes avant de replonger dans l'ambiance cauchemardesque accompagnant l'ultime séquence. A l'image de la dernière partie de The Strangers, avec lequel le film partage de nombreux points (le lien entre modernité et tradition, la présence discrète et pourtant omniprésente des croyances, la perversion de l'innocence, l'importance de l'héritage...), on ressort complètement lessivé de cette conclusion, qui nous hante encore bien longtemps après que les lumières se sont rallumées. 
 
The Medium est une vraie expérience, qu'il est presque criminel de ne pas proposer sur grand écran, notamment pour profiter d'une ambiance sonore particulièrement immersive. Clairement le meilleur film horrifique de l'année, et l'une des oeuvres les plus marquantes depuis longtemps, The Medium est un film qu'on a autant envie de vite revoir, afin de mieux appréhender certains détails de l'histoire, que d'oublier, tant il peut être éprouvant. 



mercredi 6 octobre 2021

Malignant

  

Titre : Malignant
Réalisateur : James Wan
Acteurs : Annabelle Wallis, Maddie Hasson, George Young
Date de sortie en France : 1er septembre 2021
Genre : épouvante, horreur
 
Synopsis :
 La vie de Madison Mitchell est perturbée lorsque de terribles visions viennent la hanter. Quelle est cette créature malveillante qui la poursuit et commet ces meurtres atroces ?
 
Avis : 
Entre deux films Aquaman, James Wan revient, comme souvent, à son genre de prédilection avec Malignant. Un film d’épouvante donc, pour celui qui alimente depuis quelques années certaines des franchises les plus rentables – et redondantes – du genre, de la saga Saw, qu’il a initiée, à la saga Insidious et au triste Conjuringverse, dont il a signé les deux premiers volets. Ces dernières années, le réalisateur semble s’être enfermé dans une recette paresseuse, mais gagnante, à base de films copiés-collés, à l’emballage plutôt élégant, mais se reposant uniquement sur les jump-scares. 
 

Bref, on a peu de doutes sur ce qui nous attend en allant voir ce Malignant, et pendant une bonne partie du film, on ne sera pas surpris : James Wan va nous proposer des plans très travaillés, faire virevolter sa caméra, faire des travellings acrobatiques, le tout juste pour étaler sa technique et finalement balancer un jump-scare. James Wan, c’est ce gamin qui fait 3 fois le tour du terrain en jonglant, en multipliant roulettes et passements de jambes, pour finalement tirer à côté. Dans les deux cas, ça manque sa cible, et c’est terriblement frustrant parce qu’on sait qu’il y a quelque chose : Wan sait faire naître la tension, il sait mettre le spectateur mal à l’aise… mais gâche systématiquement ses approches par le pire gimmick du cinéma d’épouvante moderne, aussi contreproductif (non, sursauter, ce n’est pas avoir peur) qu’insultant pour le spectateur.

Puis peu à peu, le film propose autre chose. On sort du cadre de l’épouvante pure pour explorer d’autres horizons. En fait, on sort même de l’épouvante à la mode de 2021 pour revenir plusieurs décennies en arrière : il y a presque du giallo dans cet étrange tueur à la longue veste, aux mains gantées, utilisant une arme blanche et jouant volontiers avec la lumière et les reflets. Il y a du slasher, de l’horreur psychologique, du body horror bien sale, notamment lorsque l’identité de la menace se dévoile pleinement… Le film ose enfin sortir des sentiers battus, et ça fait franchement du bien.

Et surtout, il y va avec une vraie générosité, plongeant intégralement dans l’étrangeté de son histoire : Malignant en devient un film un peu fou, sans doute bourré de défauts, sans doute un peu grotesque par moments (le poste de police), sans doute souvent de mauvais goût, mais d’une folie que l’on perd malheureusement dans le cinéma horrifique sur grand écran. Forcément, on va perdre les adeptes de l’épouvante bien lisse et bien calibrée, mais de mon côté, je préfère mille fois cette proposition à l’idée de me refaire un Conjuring

 


 

mercredi 7 juillet 2021

Conjuring : sous l'emprise du Diable


Titre : Conjuring : sous l'emprise du Diable (The Conjuring: the Devil made me do it)
Réalisateur : Michael Chaves
Acteurs : Vera Farmiga, Patrick Wilson, Ruairi O'Connor
Date de sortie en France : 9 juin 2021
Genre : épouvante, thriller

Synopsis : 
Dans cette affaire issue de leurs dossiers secrets – l'une des plus spectaculaires – , Ed et Lorrain commencent par se battre pour protéger l'âme d'un petit garçon, puis basculent dans un monde radicalement inconnu. Ce sera la première fois dans l'histoire des États-Unis qu'un homme soupçonné de meurtre plaide la possession démoniaque comme ligne de défense.

Avis : 
Huitième volet de l’univers cinématographique Conjuring, Sous l’emprise du Diable nous permet de retrouver, 5 ans après Le Cas Enfield, le couple Warren. Entre temps, l’univers s’est enrichi de nouveaux films consacrés à la poupée Annabelle (La Création du mal puis La Maison du mal), au démon Valak dans La Nonne, et à la Llorona dans La Malédiction de la Dame Blanche. C’est d’ailleurs au réalisateur de ce dernier, Michael Chaves, que revient la lourde tâche de succéder à James Wan, ce dernier se contentant de produire et de participer au scénario.

 
Comme pour les précédents épisodes, Conjuring 3 est inspiré de faits réels, ce qui signifie qu’il se base vaguement sur des histoires à la véracité douteuse relayées par des personnes ayant tendance à déformer la réalité. Cette fois, le scénario aborde l’histoire de Arne Cheyenne Johnson, qui après avoir tué son propriétaire, tenta de plaider la possession démoniaque pour expliquer son geste. Sans succès. L’histoire va permettre à la saga d’explorer de nouveaux horizons, entre malédiction et sorcellerie, en privilégiant son côté « enquête » - qui a toujours été, à mes yeux, l’élément le plus réussi de la saga.
 
On n’échappera malheureusement pas aux insupportables clichés que le genre nous vomit à la tronche depuis trop longtemps. Refusant d’installer une quelconque ambiance, le film ne se construit qu’autour de jump-scares stéréotypés et sans surprise, tente de donner le change en faisant beaucoup, beaucoup de bruit, et nous gratifie une nouvelle fois des éternelles séances de contorsionnisme diabolique pour illustrer la possession. On a parfois l’impression que, paniqué à l’idée d’avoir montré un élément un peu plus subtil, Conjuring se met à hurler et à trembler pour vite reprendre les rails de l’épouvante inoffensive grand public.

 
Et si la réalisation de Chaves évite le côté « m’as-tu vu » dans lequel s’enfermait parfois Wan (pas de travelling à 360° à cloche-pied les yeux bandés ici), c’est pour mieux insister sur ses références, le film reprenant par exemple le plan iconique de L’Exorciste, ou pour mieux tuer dans l’oeuf tout élément de surprise. Absolument rien ne dépasse, c’est propre, c’est carré, c’est lisse… c’est l’univers cinématographique Conjuring, et apparemment, c’est ce que veut voir le public, qui se rue en salles à chaque épisode.
 
Si le film n’essaie plus de faire peur, il tente en revanche d’apporter un peu de substance à son scénario. Il faut bien avouer que cela fonctionne plutôt bien, à l’image de ce que proposait par moments Le Cas Enfield. Rien qui viendra renouveler le genre, mais le mystère est assez efficace pour donner envie de suivre l’enquête. Dommage que ça se termine en eau de boudin, entre révélation bancale et vite expédiée, mais c’est sans doute dans cette direction que la saga devrait creuser pour ses inévitables futurs épisodes.
 
De l’épouvante prémâchée, sans saveur, et qui ressemble à tous les films d’épouvante de ces dernières années : Conjuring : sous l’emprise du Diable remplit sans doute parfaitement sa fonction de gentil blockbuster horrifique estival pour adolescent. On passera plus de temps à secouer la tête de dépit qu’à frissonner…
 

 

vendredi 4 octobre 2019

Halloween 3 : le sang du sorcier


Titre : Halloween 3 : le sang du sorcier (Halloween III : season of the witch)
Réalisateur : Tommy Lee Wallace
Acteurs : Stacy Nelkin, Ralph Strait, Tom Atkins
Date de sortie en France : 
Genre : épouvante, horreur, thriller

Synopsis : 
Un fabricant de masques d'Halloween met au point un plan démoniaque pour tuer des millions d'enfants avec ses masques... 
Avis : 
Après les succès de Halloween, la nuit des masques et Halloween 2, le projet initial était de dire adieu à Michael Myers et de faire de la saga une anthologie d’histoires liées à la fête. Hélas, le faible succès commercial et critique de cet Halloween 3 va entraîner le retour de Michael Myers pour une série de suites plus mauvaises les unes que les autres. Dommage. 


Car s’il a été mal reçu à l’époque, et est toujours renié par les fans de Michael Myers qui n’ont pas compris que cet épisode est bien plus lié à la série que les nanars qui ont suivi, Halloween 3 est depuis devenu un petit classique, dont on apprécie le scénario, simple mais efficace, et l’ambiance, qui est typiquement celle d’un film que l’on pourrait regarder le 31 octobre.

Sur fond de sorcellerie et de science-fiction, le film nous propose une enquête sur une terrible machination destinée à massacrer des centaines d’enfants. Si ladite enquête est d’une étonnante simplicité (les méchants font leurs trucs de méchants au nez des gentils, qui ont la chance de toujours se trouver au bon endroit), elle se laisse suivre avec plaisir, grâce à des ennemis effrayants (ils ressemblent à certains de mes collègues des finances publiques, horrible!) et quelques mises à mort assez violentes. Le final est également très réussi, avec une fin ouverte qui laisse envisager le pire.

Avec en prime une (gentille) critique de la société de consommation, de la place de la télé dans la famille et de la commercialisation à outrance de la fameuse fête, cet Halloween 3 vaut bien mieux que la grande majorité de la saga. J’aurais vraiment aimé voir cette fameuse anthologie, surtout si chaque volet avait été au niveau de ce « Sang du sorcier » !
 
 Note : 6,5/10


samedi 28 septembre 2019

Halloween 2


Titre : Halloween 2
Réalisateur : Rick Rosenthal
Acteurs : Jamie Lee Curtis, Donald Pleasance, Charles Cyphers
Date de sortie en France : 16 juin 1982
Genre : horreur, épouvante

Synopsis : 
Michael Myers, échappé de l'hôpital psychiatrique, sème de nouveau la terreur dans la petite ville d'Haddonfield. Les habitants fêtent Halloween, la nuit des sorcières et la police a bien du mal à démasquer le meutrier. 
 
Avis : 
John Carpenter ne le savait pas, mais avec son Halloween, il a initié l’une des plus prolifiques sagas du cinéma horrifique, et fait naître l’un de ses plus fameux boogeymen. Dès 1981, alors que lui-même n’est pas très enthousiaste à cette idée, une première suite voit le jour, avec comme unique leitmotiv celui de proposer des meurtres plus violents. 


Entre deux révélations sans intérêt (Myers est le frère de Laurie, rebondissement un peu grotesque qui caractérisera la saga jusqu’au Halloween de 2018), le Dr Loomis se contente de tourner en rond à la recherche du tueur, ennuyant ou agressant tous ceux qu’il croise, jusqu’à causer directement la mort d’un innocent. Pourquoi personne n’intervient-il pour le remettre à sa place, on l’ignore, mais on comprend peut-être mieux pourquoi personne ne l’a informé des liens entre le tueur et sa proie favorite, les risques de harcèlement étant trop grand.

Pendant ce temps, Myers tue de façon parfois violente, parfois trop travaillée (les seringues, l’hémorragie), Laurie chouine et se contente une nouvelle fois d’être une proie bien docile, et les victimes multiplient les actions idiotes afin d’offrir à leur prédateur des situations de meurtre facile.  

Halloween 2 est donc l’archétype du slasher de base, dont on retiendra principalement certaines apparitions de The Shape sortant doucement de l’ombre. C’est bien peu de choses…

Note : 2,5/10