Titre : Le Passé
Réalisateur : Asghar Farhadi
Acteurs : Bérénice Béjo, Tahar Rahim, Ali Mosaffa
Date de sortie en France : 17 mai 2013
Genre : drame
Synopsis :
Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française, pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de son bref séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille, Lucie. Les efforts d'Ahmad pour tenter d'améliorer cette relation lèveront le voile sur un secret du passé.
Avis :
Après la consécration internationale d'Une séparation, Asghar Farhadi était attendu au tournant. Il choisit pour l'occasion de venir tourner en France, avec des comédiens français, en langue française, ce qui l'obligera à avoir recours à un interprète pendant le tournage. Alors que le rôle de Marie devait à l'origine revenir à Marion Cotillard, son emploi du temps l'obligea à renoncer, et elle fut remplacée par Bérénice Bejo (The Artist, Populaire), à ma plus grande satisfaction. Le rôle de Samir sera quant à lui interprété par Tahar Rahim, révélé par Un prophète de Jacques Audiard.
S'il transpose son intrigue à Paris, Farhadi n'abandonne pas pour autant ses thèmes de prédilection, avec ses secrets gardés depuis bien trop longtemps et sa cellule familiale en crise. D'emblée, la situation est compliquée : Marie fait revenir Ahmad en France afin d'officialiser leur divorce. Elle a deux filles, dont le père vit maintenant en Belgique, et vit avec Samir, qu'elle souhaite épouser et dont elle attend un enfant. Samir a lui aussi un enfant, qu'il a eu avec son épouse, actuellement dans le coma après une tentative de suicide. Lucie, la fille aînée de Marie, déteste Samir et souhaite à tout prix voir sa mère renoncer à se marier avec lui. Au milieu de tout ça débarque donc Ahmad, dont la présence va rapidement attiser toutes les rancoeurs de ce joli monde.
Le réalisateur iranien va ainsi s'appuyer sur les regards de ses acteurs,jouer sur les silences gênés (notamment cette formidable séquence où Samir et Ahmad attendent longuement, sans un mot ni un regard pour l'autre, le retour de Marie), et amplifier ainsi les malaises, le tout en insistant sur ces lourds secrets, dont les conséquences sont parfois terribles. Le Passé nous propose ainsi un formidable puzzle, où les personnages devront reconstituer une vérité dont l'importance était, jusqu'à l'arrivée d'Ahmad, toute relative.
Pourtant, malgré tout le talent de Farhadi pour raconter et mettre en images ces sujets, la sauce prend moins que pour ses précédents films. Peut-être, tout simplement, que le fait de situer l'action à Paris retire cette délicieuse sensation de dépaysement, malgré des thèmes universels, que l'on retrouvait en Iran. Ainsi, on est un peu plus sensible aux stéréotypes, de l'ouvrière maghrébine sans papiers, à l'accent à couper au couteau et incapable d'aligner trois mots dans un français correct, à la fille en pleine crise d'adolescence. Les révélations finissent également par en devenir caricaturales, dans une espèce de tourbillon où la subtilité habituelle de Farhadi finit par se perdre un peu.
Le Passé est donc une petite déception, principalement due à la comparaison avec les précédentes oeuvres du réalisateur iranien. Reste néanmoins une oeuvre très forte, intense et prenante, où le formidable trio d'acteurs Bejo-Rahim-Mosaffa évolue à merveille au milieu des non-dits, des secrets de polichinelle et des confrontations (ou des non-confrontations) douloureuses. Et s'il n'atteint pas la qualité de La Fête du feu ou d'Une séparation, le film d'Asghar Farhadi reste néanmoins une des plus belles réussites de cette première moitié d'année.
Note : 7,5/10
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